Boudicca | Un portrait

Boudicca est le portrait rêvé de la reine celte qui a fait trembler l’Empire Romain. Avec une touche de mysticisme, de féminisme et un talent de conteur certain, Jean-Laurent Del Soccoro a su donner vie à la reine des Icènes dans ce récit à la première personne. Il lui donne corps en lui offrant une enfance, un entourage et en adoptant son point de vue.

Portrait d’une légende

Boudicca est le portrait imaginé par Jean-Laurent Del Soccoro de la reine celte Boadicée. Plus connue outre-manche que dans nos contrées,  cette femme mérite qu’on s’y attarde davantage.

Il y a quelque chose de mythique dans son histoire. On en connait tellement peu à son sujet que le personnage pourrait tout aussi bien être une légende. De ce fait on peut la raconter de toutes les façons, elle sera toujours vraie.

Jean-Laurent Del Soccoro choisit la voie du portrait intimiste, raconté à la première personne. Il nous évoque la femme plus que le personnage historique, de l’enfance à sa mort. Il nous évoque une reine avec ses défauts et son courage. Un être vivant en somme. Il évite l’écueil de la réduire à ses rôles en se plongeant dans ses pensées, dans sa façon de voir les autres. Car c’est toujours par son regard qu’on découvre son monde : ses proches, ses filles, les Icènes, les Romains, mais aussi la guerre, l’amour, les accomplissements et les échecs.

En face de moi, je découvre moins une mêlée que des corps ruisselants d’un sang si noir qu’il semble irréel. Est-ce le leur, celui de leur adversaire ou de leur camarade ? Comment savoir ? Ils ne se battent pas, ils survivent, les corps tendus, frémissant de rage et de fatigue. Derrière ce voile, la terreur est bien présente. On la cache, on l’écarte, mais elle revient à chaque fois qu’un guerrier aperçoit un ennemi qui se tourne vers lui, une épée qui se lève au-dessus de sa tête ou une pointe de lance qui plonge vers son cœur. Aucun honneur, seulement de le peur qui remplit les interstices à chaque seconde qui s’écoule.

La fantasy de ce roman tient plus du mysticisme que de notre conception moderne des littératures de l’imaginaire. Des rêves prémonitoires, des dieux à invoquer. Pas beaucoup plus.

En terre conquise

Pour moi, Boadicée c’est surtout une dirigeante que j’apprécie de jouer dans Civilization V. Elle est badass. Son unité spéciale est le guerrier picte, son bâtiment la salle des Ceilidh. Le colon initial poppe toujours près d’une forêt, ce qui lui confère un max de foi pour développer la religion. Accessoirement on notera qu’elle était aussi présente dans Civilization II et IV.

Interlude vidéoludique mis à part, j’ai été conquise par le Boudicca de Jean-Laurent Del Socorro. J’ai vécu la vie de cette femme le temps de quelques 230 pages. J’ai profité de ce séjour en terre celte. J’ai apprécié l’écriture, poétique et fluide. Je me suis réjoui du doux féminisme qui s’échappe de ces pages.

Le reproche que je pourrais faire c’est d’avoir un goût de trop peu. De ce point de vue, la bibliographie en fin de volume est la bienvenue. Cela me donne des envies de plonger dans la saga de Scott Manda, La reine celte.

Revenir à un endroit dans lequel nous avons vécu, c’est constater que rien n’a vraiment changé, si ce n’est que nous avons perdu la place qui était alors la nôtre.

D’ailleurs et d’ici

Étonnamment, le livre se conclut par une nouvelle portant sur la Boston Tea Party de 1773 : D’ailleurs et d’ici. Surprise la plus totale. Que vient donc faire ce texte ici ? Jusqu’à ce que je me rende compte qu’il s’agit aussi d’une sombre histoire d’impôts qu’un peuple ne veut plus payer et de la révolte qui en a découlé. Est-ce une façon de nous dire que l’Histoire est amenée à se répéter ?

Informations éditoriales

Ecrit par Jean-Laurent Del Socorro. Publié en 2017. 277 pages, soit 2.9 cm d’épaisseur. Illustration de couverture (à tomber à la renverse) par Yana Moskaluk.

Pour aller plus loin

Une interview de Jean-Laurent Del Socorro.
D’autres avis : Nevertwhere, Quoi de neuf sur ma pile, Xapur, 233°C, Les chroniques de FeyGirl, ou signalez-vous en commentaire.

13 commentaires sur « Boudicca | Un portrait »

  1. Oui, un petit livre bien réussi, perso je ne connaissais pas Boudicca.
    Pour l'histoire de la fin, j'avoue aussi ne pas trop savoir ce qu'elle fait là. Un moyen d'étoffer le bouquin, un peu court ?

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  2. Je viens de le terminer, et je vois qu'on a les même références (sauf que j'ai plus joué au IV qu'au V !). J'avoue avoir été un peu frustrée de la longueur et je serais bien restée un peu plus en Brittania. Je file terminer mon article du coup !

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  3. Il explique ses motivations dans l'interview de Samuel, lien en fin de chronique. Un peu spécial mais bon c'est dans les habitudes d'ActuSF de rajouter qui une nouvelle, qui une interview en fin d'ouvrage.

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