Anthologie Utopiales 2018

Utopiales 2018 anthologieImpressions.

L’édition 2018 des Utopiales, rendez-vous SF francophone se déroulant chaque année à Nantes, avait pour thématique le corps, dans tous ses états. Il en va donc de même de l’anthologie officielle de l’événement, publiée chez ActuSF. 13 nouvelles bien dans le thème dont je vous donne un aperçu.

Cette anthologie 2018 est très réussie. Chaque texte apporte sa pierre à l’édifice et correspond bien au thème imposé. De ce fait, je vous parle de chacun d’entre eux in extenso.

Anamnèse de la chair, Olivier Cotte. 🐉🐉🐉🐉 Inédit. Texte sous forme de pièce de théâtre. Un homme attend d’être numérisé et de pouvoir enfin rejoindre sa femme. Dans un monde peu à peu vidé de ses habitants, l’attente se prolonge. Pourquoi ? Nouvelle glaçante. Qu’est-ce que l’humanité a à perdre ou à gagner de la numérisation des consciences ?

L’HOMME. Tu m’étonnes… Plus de table, plus de jambes… Plus de corps, ça aide à se calmer…
CAROLE. Oh ! Mais il ne faut pas que tu considères les choses de cette manière. Il se trouve juste que l’on est bien plus tranquille là-bas, c’est tout. Plus tranquille d’esprit. Le corps, finalement, c’est ce qui nous encourageait aux débordements.

Monade incarnate, Li-Cam. 🐉🐉🐉 Inédit. Sur Sitive, les migrants affluent et il revient au Kalpa de les autoriser à rester ou non. Il lui revient aussi de choisir la génitrice de sa prochaine incarnation.  La question du corps est centrale dans cette nouvelle où il est question de mère porteuse, de divin et de non-divin, d’être humain ou non.

Conatus, Laurent Genefort. 🐉🐉🐉🐉🐉 Inédit. Un homme prolonge sa vie de façon artificielle en pratiquant la transplantation corporelle. Sa famille est contre pour des raisons religieuses. Sa mère lui réserve une punition qui ressemble à l’Enfer.

Le cerveau du président a disparu, John Scalzi. 🐉🐉🐉🐉🐉 Traduit par Sylvie Denis. Inédit. Toute ressemblance avec une personne existant ou ayant existé serait purement fortuite. Tout le monde sait que le président n’a pas de cerveau. Personne ne devrait donc s’étonner de sa disparition. Et pourtant. Ce sera le rôle d’Alex d’enquêter sur cette étonnante disparition. Très fun, très « Scalzi » si j’en crois la ressemblance de ton avec les épisodes de Love Death + Robots adaptés de ses nouvelles.

Déliance, Sabrina Calvo. 🐉🐉🐉🐉 Inédit. Nouvelle déconcertante où il est question d’une femme qui achète un nouveau frigo pour y conserver un flocon tombé un après-midi d’Août sur son gros orteil fraîchement verni.

Rayon surgelé, je ferme les yeux en ouvrant un congélateur de compétition. J’ai envie de m’y lover, entre les fish and chips et les crevettes décortiquées.
[Déliance, Sabrina Calvo]

Ascension, Patrick Dewdney. 🐉🐉🐉 Inédit. Pendant que dans la vallée, les villes brûlent un homme et une femme poursuivent leur ascension vers un chalet isolé en haute montagne. Un texte au style qui fait de loin penser à celui de Cormac McCarthy dans La Route qui parle de solitude.

La première pierre, Ursula K. Leguin. 🐉🐉🐉🐉🐉 Traduit par Anne-Judith Escombey. 1992 pour la première publication en anglais, 2010 en français. Magnifique texte. Comment de l’Art peut naître la révolution ? Comment donner du sens à cet Art peut faire prendre conscience qu’on a des choses à dire lorsque l’oppresseur veut faire croire le contraire ?

Le Garçon du goûteur, Ben H. Winters. 🐉🐉🐉🐉 Traduit par Erwan Devios et Hermine Hémon. 2013 pour la première publication en anglais. Inédit en français.  Un tyran a asservi le monde et se complet à martyriser ses sujets. Il torture jusqu’à la mort les parents d’un jeune garçon puis le relâche curieux de sa vengeance à venir.  Mais on a les ennemis qu’on mérite. Que reste-t-il de l’Autre lorsqu’on l’a complètement annihilé ?  Et que reste-t-il du tyran ?

Le Syndrome de Pan, Morgane Caussarieu. 🐉🐉🐉🐉 2015. Une revisite du mythe de Peter Pan version vampire. La nouvelle est cruelle et glauque comme l’autrice sait le faire. On y reconnait son appétence pour les enfants innocemment corrompus et les adultes impuissants.

Magie des renards, Kij Johnson. 🐉🐉🐉🐉 Traduit par Mélanie Fazi. 1993 pour la première publication en anglais, 2002 en français. Relu.  Une jeune renarde aime un homme. Alors sa famille l’aide à créer une illusion d’humanité pour le séduire, grâce à la magie des renards. Texte très douloureux où au final on ne fait que ressentir de la peine pour tous les protagonistes.

L’Amour au temps des chimères, Elizabeth Vonarburg. 🐉🐉🐉 2013. Djani peut changer d’apparence et de sexe comme bon lui semble. Il est agacé par l’obsession de sa communauté pour la perpétuation de leurs gènes. Tout ce qu’il veut c’est aimer un jeune homme qui vient voir son spectacle tous les jours. Un beau texte sur l’ouverture à la différence, à la non-binarité des genres et des êtres.

La Pluie, Alex Evans. 🐉🐉🐉 Inédit. Nouvelle postapocalyptique sans espoir aucun. Une épidémie  a transformé peu à peu la population en « bouffeurs », maladie qui transforme peu à peu les gens en zombie. Il pleut tellement que tout pourrit. Il n’y a plus rien à manger. Alicia et Karen tentent de survivre dans un monde mort dans l’attente de l’évolution de la maladie.

Morts à crédits, Jehanne Rousseau. 🐉🐉🐉🐉 Inédit. Trois personnages de jeux vidéo emblématiques discutent de leurs vies. Bel hommage aux personnages de jeux vidéos 1000 fois sacrifiés,  aux multiples vies qu’un gamer vit et au droit à l’erreur si caractéristique du jeu vidéo.

Un jour pluvieux, je peux être un chat magicien et le soir même dictateur de république bananière. De votre côté, je peux sauter plus haut, courir plus vite, combattre avec agilité comme je serais incapable de le faire dans la réalité. Je peux diriger des armées, je peux bâtir des civilisations et abattre des empires.

Mes textes préférés sont Conatus de Laurent Genefort, Le cerveau du président a disparu de John Scalzi, La première pierre d’Ursula K. Leguin et Morts à crédits de Jehanne Rousseau. Mais tous ont un petit quelque chose et aucun ne m’a déplu.

L’anthologie des Utopiales 2018 est particulièrement réussie. Chacun des textes s’empare de la thématique du corps à sa façon. Les auteurs et les autrices font peuvent d’une certaine originalité dans leurs sujets : d’une pièce de théâtre sur le transhumanisme à une revisite du mythe de Peter Pan façon fantasy urbaine en passant par un hommage aux personnages de jeu vidéo. Voilà qui démontre la richesse de la science-fiction. On en attend pas moins de l’anthologie des Utopiales.

Informations éditoriales

Publié en 2018 chez ActuSF. 13 nouvelles toutes citées dans la chronique. Précédées d’un avant-propos. Illustration de couverture par Beb-Deum. 327 pages.

Pour aller plus loin

Mes impressions sur les précédentes anthologie des Utopiales : 2010201120122017.
D’autres avis : La grande bibliothèque d’Anudar, Nevertwhere, ou signalez-vous en commentaire

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19 commentaires sur « Anthologie Utopiales 2018 »

  1. *ne pas faire de commentaire sur la couverture/affiche*
    Rares sont les recueils sans fausse note, c’est cool. J’ai lu « Magie des renards », il ne m’en manque donc plus que 12, je suis à ça d’avoir lu le recueil sans le lire. =O

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    1. Bah au moins c’est original ^^
      Je… Hum… J’ai entendu dire que l’auto-suggestion pouvait en effet s’avérer efficace dans certains cas *no judging*

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      1. Je repasse tandis que je termine ma chronique, assez d’accord avec toi. Y’a quelques textes qui me sont passés au dessus mais j’étais assez fatiguée quand je lisais. Gros coup de coeur pour les textes de Morgane Caussarieu et de Li-Cam pour ma part (Ursula Le Guin et Kij Johnson ne comptant pas vu que je les avais déjà lus ^^).

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        1. C’est toujours compliqué les nouvelles quand on est fatigué je trouve. J’ai un peu ça avec Lumières noires en ce moment que je lis du coup à une allure de tortue (alors que c’est vachement bien).

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