
Vigilance est une novella écrite par Robert Jackson Bennet et publiée en 2020 dans la collection Une Heure Lumière. Je poursuis mon rattrapage de lecture de la collection avec cette 26ème publication, la quatrième de l’année 5. On passe une journée dans les coulisses de Vigilance, une émission de télé-réalité qui fait du bruit, celui des coups des feu des armes automatiques. Serez-vous suffisamment vigilants pour survivre ?
De la télé…
Etats-Unis, futur proche. L’ambiance est crépusculaire. La jeunesse fuit le pays. Le pays s’englue dans son climato-sceptiscime. Incapable de s’adapter, il laisse la Chine devenir la première puissance mondiale. Les seuls qui ont encore de l’argent à dépenser sont les vieux mâles blancs. Il faut bien les occuper et faire de la thune avec les revenus publicitaires.
John McDean est le producteur de Vigilance, une émission de télé-réalité ultra-populaire qui propose des tueries de masse en guise de divertissement. On suit son quotidien façon caméra à l’épaule dans les différentes étapes qui composent la préparation de la prochaine émission. Sélection des candidats, choix du lieu, discussion avec le patron de la chaine, arrangements publicitaires, etc.
Des images de drone, maintenant : un groupe assez conséquent de personnes, surtout des familles, tape désespérément du poing sur les parois hautes de six mètres dressées devant les sorties du centre commercial. De l’autre côté du verre blindé, les sous-traitants sécurité d’ONT les regardent faire, le visage figé dans l’expression neutre et morne de qui est grassement payé pour ne rien penser ni ressentir.
En parallèle, on suit Delyna, barmaid à la South Tavern, où les habitués attendent avec impatience la prochaine émission qui sera, bien sûr, transmise sur la télé du bar. Delyna ne comprend pas l’attrait de ses concitoyens (cons citoyens ?) pour Vigilance. Elle est notre phare morale dans ce marasme de violence et de publicités.
Delyna garde les yeux fixés sur les écrans, entourée d’images du policier gisant au sol. Les caméras viennent grouiller au-dessus de lui pour capter sa mort sous tous les angles. L’humiliation, la vacuité d’une telle mort, seul derrière une rangée de poubelles de centre commercial rien que pour un spectacle, la laissent interloquée.
… A la réalité
Vigilance est un récit qui fait froid dans le dos. Son propos est d’une pertinence et d’une actualité folle. Je lis ce texte avec un peu de retard mais il a été publié alors que Trump faisait encore claquer les drapeaux de idiocratie aux Etats-Unis. Non pas que quoi que ce soit soit résolu depuis qu’il a quitté la Maison Blanche. Loin s’en faut. Rappelons que la Cour Suprême vient de révoquer le droit fédéral à l’avortement alors que le pays se remet d’une ixième tuerie de masse dans une école et que certains états se proposent de régler le problème en armant les profs, lolilol.
Comme c’est facile de nous faire nous détruire, en Amérique, songe-t-elle. Il suffit d’en faire un spectacle.
Robert Jackson Bennet n’a rien inventé : Running Man, Hunger Games, Battle Royale, American Nightmare et sans doute bien d’autres medias sont passés par la case de la mise en scène de la violence autorisée et médiatisée. Ce qui fait la force et la particularité du texte, c’est son actualité et son ton clinique. En sociologue d’un futur proche qui ne sonne malheureusement pas comme improbable, l’auteur nous livre une étude mortifère d’un pays victime de ses trois plus grandes addictions : le capitalisme, les armes à feu et la peur.
Tout tenait au fait que depuis toujours, l’Amérique est une nation qui a peur.
Robert Jackson Bennet met les USA face à ses pires travers, à savoir le capitalisme, les armes à feu et la peur. La lecture en est glaçante car en directe continuité avec l’actualité. La puissance d’une balle dans le ventre, pas moins.
Informations éditoriales
Novella écrite par Robert Jackson Bennet. Publié pour la première fois en 2019. 2020 pour la traduction française dans la collection Une Heure Lumière aux éditions Le Bélial’. Titre original : Vigilance. Traduit de l’anglais (US) par Gilles Goulet. Illustration de couverture par Aurélien Police. 165 pages.
Pour aller plus loin
D’autres avis : Le bibliocosme, La bibliothèque d’Aelinel, Les critiques de Yuyine, Chut maman lit, Les lectures de Xapur, Sometimes a book, Quoi de neuf sur ma pile, Nevertwhere, Lorhkan et les mauvais genres, Au pays des cave trolls, L’épaule d’Orion, Les chroniques du chroniqueur, Le culte d’Apophis, Les lectures du Maki, ou signalez-vous en commentaire.
Vu la direction que prennent les choses, j’ai l’impression que ce texte n’est pas prêt de prendre une ride.
Je comptais le prendre lors de ma dernière commande, et puis finalement non, va savoir pourquoi. 🤷♂️ Ça devrait être pour la prochaine. ^^
J’aimeJ’aime
En effet…
Bonne idée c’est un titre important de la collec, àmha ^^
J’aimeJ’aime
Il faut absolument que je le lise !
J’aimeJ’aime
YES !
J’aimeJ’aime
Comme tu le soulignes, l’actualité ne rend ce texte que plus fort malheureusement. Je me souviens qu’il m’avait fait une forte impression et que j’avais été incapable d’écrire dessus, de mémoire. Il faudrait que je le relise pour changer ça !
J’aimeJ’aime
C’est en effet un texte qui fait forte impression. J’espère que tu trouveras l’occasion de le relire et le chroniquer, je lirais ton avis avec intérêt ^^
J’aimeAimé par 1 personne
Merci ! Je pense que je le ferais je vais sûrement le donner à lire en théories de la communication pour pousser à une réflexion critique sur le sujet mais je dois voir comment l’articuler de manière intelligente 😁
J’aimeJ’aime
Mais oui super intéressant !
J’aimeAimé par 1 personne
Je le lirai bientôt (fin, dans un mois et demi), et je suis très curieuse de pouvoir le lire à la lumière des évènements actuels et à venir. Merci pour ton retour!
J’aimeJ’aime
Bonne future lecture ! J’espère qu’il ne sera rien arrivé de plus aux US pour « actualiser » ta lecture 😅
J’aimeAimé par 1 personne
Très percutant ce texte, heureusement qu’il n’est pas trop long, je crois que je n’aurais pas supporté
J’aimeJ’aime
En effet, valait mieux qu’il fut court ^^
J’aimeJ’aime
Ah bin je l’ai lu celui-là!
De fait, c’était glaçant… et la réalité fait peur…
J’aimeJ’aime
Oui…
J’aimeJ’aime
Ce texte m’embête beaucoup : je suis sûre que la thématique m’intéressera, mais je crains aussi son côté glaçant…..Un jour sans doute je tenterais !
J’aimeJ’aime
Texte percutant, dérangeant comme l’actualité dans ce pays.
J’allais dire en lisant les premiers paragraphes que le sujet avait été abordé dans pleins de films, tu en as cité certains mais je pensais à un autre, vu quand j’étais ado ou étudiante, mais le titre ne me revient pas.
Bref, un écrit sur le thème, c’est toujours essentiel.
J’aimeJ’aime
Ha mince, si ça te revient ou si tu as des éléments caractéristiques du film en tête, ça m’intéresse ^^
J’aimeJ’aime
Tellement percutant ce texte j’en ai des sueurs froide à la lecture. Un de mes textes préférés de la collection.
J’aimeJ’aime
Il est très très fort, un texte auquel on repense après lecture ^^
J’aimeAimé par 1 personne
Ce texte a l’air ouf. Je ne l’ai pas lu, mais les chroniques ont suffi pour me faire peur. ^^
(Il faut que je retienne le mot « interloqué »… Ça pourrait être utile dans un texte… Merci d’avoir cité ce passage. 😉)
J’aimeJ’aime
PS: J’oubliais… Super titre de chronique!!! 👏
J’aimeJ’aime
Haha, merci ^^
J’aimeAimé par 1 personne
C’est un bon mot interloqué ^^
J’aimeAimé par 1 personne