
Après nous les oiseaux est la premier roman de Rakel Haslund, une autrice danoise. Il a été traduit en français par Catherine Renaud et publié chez Ailleurs et Demain en avril 2023. C’est du postapo minimaliste à « La Route ». Je l’ai lu et je vous dis tout ce que j’en ai pensé.
La protagoniste de cette histoire n’a pas de nom. Dans un monde en ruine, elle est seule, complètement seule après avoir perdu la femme qui l’a élevée, dont le nom se réduit quant à lui à une seule syllabe. Elle décide de quitter l’île sur laquelle elle a toujours vécu en quête d’un sens à son existence.
Dès les premières pages l’atmosphère est mélancolique. Cette gamine est vraiment absolument toute seule. Avant il y avait Am mais Am n’est plus. On passe de ses souvenirs de la survie avec Am au temps présent. L’écriture est très belle et en même temps très épurée. Un moment j’en ai voulu à cette Am de ne pas lui avoir plus expliqué le monde d’avant. Pourquoi ne lui a-t-elle pas appris à lire ? La réponse à cette question est très clairement : à quoi bon ?
C’est quoi ? avait-elle demandé.
Peu importe maintenant, avait dit Am en jetant l’horloge dans la mer.
Toute la solitude du monde, c’est lourd à porter. Il est difficile de conserver une identité lorsqu’on n’a plus personne en face sur laquelle la faire rebondir. Sa seule rencontre c’est un oiseau, une corneille ou un corbeau, on ne sait pas car elle ne sait pas, qu’elle décide de suivre. Mais toujours cette solitude. C’est douloureux, comment trouver un sens à tout cela, il n’y en a pas ? On peut dès lors se demander à juste titre : à quoi bon cette lecture ? Ce que je conçois absolument. De mon côté, j’aime bien m’interroger sur la vacuité du sens de la vie et me complaire dans des questionnements existentiels sur ce qui fait de nous des humains, l’importance du langage, des souvenirs.
Ce n’était pas difficile de trouver des pommes et des souris, mais elle n’avait pas envie de manger, elle voulait juste rester allongée dans l’herbe et devenir de l’herbe. Elle n’avait pas envie de penser, et l’herbe ne pense pas, alors elle essayait de ne pas penser, mais essayer de ne pas penser est la même chose que penser, et la pensée grandissait pour finalement devenir un mot qu’elle ne parvenait pas à oublier. Alors c’était comme si elle s’était réveillée, elle avait regardé autour d’elle et avait pensé : je.
J’ai beaucoup pensé à La route en lisant ce texte, il y a d’indéniables points de comparaisons qui vont bien au-delà de la thématique postapocalyptique. Un enfant qui n’a pas connu le monde d’avant, une relation de type parent-enfant (qui est de l’ordre du passé ici), un style épuré, un dénuement de tout et les questionnements existentiels, même si ceux d’Après nous les oiseaux explorent d’autres voies. Et la déprime qui guette à chaque détour de page, bien sûr.
Après nous les oiseaux est un roman, court et épuré dans lequel on suit une jeune fille absolument seule dans un monde apocalyptique. Comme une tentative de réponse à la question : que reste-t-il de l’humanité quand il n’y a plus personne à qui parler ?
Informations éditoriales
Roman écrit par Rakel Haslund. Publié initialement en 2020. 2023 pour la publication française. Traduit du danois par Catherine Renaud. Titre original : Alle himlens fugle. Illustration de couverture par Alice Peronnet. 197 pages.
Pour aller plus loin
Mon avis sur La route de Cormac McCarthy.
D’autres avis : L’épaule d’Orion, Au pays des cave trolls, ou signalez-vous en commentaire.
J’étais déjà sûre qu’il allait rejoindre ma PàL, mais là tu me confortes dans mon choix ^^.
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Parfait !
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Ça me déprime rien que de lire ta chronique. 🙈
Ça ne m’attire pas, surtout que je ne crois pas avoir grandement apprécié « La Route », et en même temps il y a une certaine beauté dans le fait d’assumer pleinement la vacuité qui me fait penser qu’au bon moment ça doit une bonne lecture. Et puis il y a une corneille quoi.
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En tout cas ça se lit très vite 😀
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Je plussoie Baroona en étant encore plus critique envers La Route qui m’a ennuyé à mourir (et je suis gentil !) Je me doutais que ce roman n’était pas pour moi, après ta chronique j’en suis sur !
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Ha oui non en effet, c’est pas pour toi, contente que ma chronique ai pu te le confirmer 😅
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Ca sert aussi à ca les blogopotes… 🙂
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Tout à fait ^^
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Pour le coup ça m’intéresse pas mal, encore plus avec la comparaison avec La route !
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Je peux te le prêter si tu veux, mais c’est du postapo, hein 😅
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Pareil que Baroona, rien que ta chronique me colle le cafard alors je pense que ce livre n’est pas pour moi (je vais aller lire Les cartographies plutôt 😂)
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Huhu 🤣
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C’est une thématique intéressante. Le dernier être humain (ou, en tout cas, le dernier être humain dans le contexte de l’être humain étudié). C’est un peu : que se passe-t-il après Le dernier homme de Mary Shelley ou La Mort de la Terre de Rosny Aîné ? Perso, ça me fait perdre la tête rien que d’y penser, mais c’est passionnant.
Un livre danois en plus, ce n’est pas commun.
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Oui c’est vertigineux, mais dans le sens abyssal en fait tellement c’est annihilant.
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C’est vrai que ça n’est pas très joyeux tout ça… tu en parles bien mais pas sûr que cela me tente. Cela dit, dans cette thématique il faudrait que je j’essaye La Route tout de même.
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Oui, La route est un classique ^^
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