Les cartographes | Peng Shepherd

Les cartographes est le second roman de Peng Shepherd, dont j’avais adoré Le livre de M. Il est sorti en français en mars 2023 chez Albin Michel Imaginaire sous la traduction d’Anne-Sylvie Homassel. Je pensais aimer ce livre, je l’ai lu très vite mais j’ai beaucoup de reproches à lui faire. Qu’est-ce qui s’est passé ? Je vous dis tout.

Contexte narratif

Il y a 7 ans, Nell Young stagiaire cartographe à la NYPL (New York Public Library pour les intimes) se fait virer par son père qui dirige le département à cause de la sombre affaire du « Carton à jeter« . Cela brise sa carrière, ainsi que celle de son petit ami qui a eu le malheur de prendre sa défense. Depuis tout ce temps, elle travaille chez « Classic » qui vend des copies de cartes vieillies artificiellement à des particuliers.  C’est alors que son père décède. Dans un tiroir secret de son bureau, elle tombe sur la vieille carte routière du fameux Carton à jeter. Pourquoi son père a-t-il gardé cette carte qu’il affirmait être sans valeur ? Quel est le rapport avec le décès de sa mère dans un incendie alors qu’elle avait trois ans (Nell, pas la mère, obviously)? Les découvertes qu’elle va faire sont incroyables et bouleversantes, mettant au jour 30 ans de secrets, mais vont aussi lui attirer un paquet d’ennuis.

Il faut avouer que le pitch envoie du rêve. Une bibliothèque. Des cartographes. Une carte qui est plus qu’une carte. Un mystère familial. Des lieux cachés. Et une héroïne prête à tout pour découvrir ce qui se trame.

D’enthousiasme en frustration

Forte de mon engouement pour le précédent roman de l’autrice et de la thématique « la carte est le territoire » plus qu’alléchante , j’ai donc commencé ma lecture avec enthousiasme. Pendant un moment, j’ai laissé faire l’enthousiasme. Après tout, ce livre était en train de m’aider à sortir d’une panne de lecture épouvantable qui m’avait fait trainer le même bouquin pendant 7 semaines (la faute au livre, la faute à mon acouphène, aux insomnies, à l’univers et au reste) et les trucs qui me chiffonnaient n’étaient rien comparativement au plaisir d’enchainer les pages et d’avoir envie d’aimer ce livre.

De chiffonnerie en chiffonnerie, je suis arrivée au bout de ma lecture avec une immense frustration et l’impression d’avoir tenu entre mes mains un roman au concept puissant qui pouvait ouvrir what milliards de portes étonnantes et intellectuellement réjouissantes mais dont l’effet est retombé comme un soufflé. Dans la banalité narrative, les intentions confuses des personnages et les facilités scénaristiques.

Beaucoup trop d’éléments d’intrigues dans ce roman ne peuvent tenir qu‘à la condition qu’on ne se pose pas trop de questions et à des illogismes comportementaux qui sont présents non pas parce que les personnages ont telle personnalité ou telle histoire mais juste parce que sinon le livre n’existerait pas tel qu’il est. Ce qui est cocasse vu le sujet. 

L’ensemble en devient creux et je trouve ça ma foi fort dommage avec un concept pareil et comment l’autrice en est venue à écrire ce roman. En fait, la réalité est bien plus mindblowing que la fiction qui en a découlé, puisqu’en soit l’intrigue est assez prévisible. Ce qui fait que ma partie préférée du roman, ce sont les remerciements dans lesquels la part « réelle » d’Agloe est expliquée. 

Ce que j’ai bien aimé aussi c’est la fin, pas le dernier chapitre que j’ai trouvé absurde au vu de ce que venaient de vivre les personnages, mais dans le pénultième, le petit twist final en pied de nez, c’était rigolo et ingénieux. 

Fondant son récit sur un concept passionnant, Les cartographes fait un sympathique thriller pour bibliophiles … à la condition de ne pas être trop regardant sur les facilités scénaristiques.   

Informations éditoriales

Roman écrit par Peng Sherpherd. Publié initialement en 2022. 2023 pour la publication française. Traduit de l’anglais (US) par Anne-Sylvie Homassel. Titre original : The Cartographers. Illustration de couverture par Timothée Mathelin. 471 pages.

Pour aller plus loin

Mon avis sur Le livre de M.
D’autres avis : L’épaule d’Orion, Les lectures du Maki, Le bibliocosme, Les chroniques de Feygirl, Le nocher des livres, Au pays des cave trolls, Les critiques de Yuyine, ou signalez-vous en commentaire.

31 commentaires sur « Les cartographes | Peng Shepherd »

  1. Merci pour ta chronique!
    Je ne savais pas si je devais me laisser tenter ou pas 😉
    J’avais bien aimé le Livre de M, mais avec quelques réserves aussi. Je crois qu’il y avait aussi un souci « d’éléments et de conditions »… (si je me souviens, je crois que les conditions étaient trop « facilement » remplies pour que l’action continue… des trucs un peu bancals (bancaux!?! ;-))

    Mais de fait, le thème avait l’air fort tentant!

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    1. Aucun souvenir de ce type de problématique sur Le livre de M mais cela dit j’ai remarqué que mon degré de tolérance n’était pas à 0 non plus. Et ça dépend aussi de ce que le roman apporte d’autre. Le livre de M avait une telle puissance émotionnelle pour moi.
      Je crois qu’on dit bancals Xd

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      1. Je ne sais plus… j’invente ou je confonds peut-être 😉
        J’avais plutôt bien aimé, mais je me souviens que j’avais un petit « hic » (ahah faudrait que je relise ma chronique). Moi aussi je suis bancale 😉

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        1. Ce qui est peut être plus difficile à accepter dans Le livre de M c’est la part d’imaginaire qui est en effet un peu spéciale, mais je trouvais que l’ensemble avait une cohérence interne suffisante (ce qui ne veut pas dire parfaite, tu as peut être tiqué sur des trucs qui ne m’ont pas parlé). Lol t’es pas bancale XD

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  2. Ça se lit très bien et très facilement mais il ne faut pas être regardant sur la cohérence et les ficelles ? C’est un blockbuster en fait ?
    « la réalité est bien plus mindblowing que la fiction qui en a découlé » : normalement je réagis toujours en disant que c’est habituel, la réalité n’ayant pas besoin d’être crédible elle, mais là le livre ne l’est pourtant pas non plus. 😅 C’est vraiment dommage parce que le pitch est top. Je pense que je tenterai à l’occasion, mais avec tes bémols en tête, pour moins en attendre.

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    1. Haha, peut être.
      Tu as bien raison, pour finir la réalité peut se permettre plus de choses, elle ne risque pas de se faire accuser de pas être crédible. Mais bon là sur la crédibilité du livre, le souci c’est pas l’élément fantastique bien sûr, c’est le manque de crédibilité au niveau des personnages et de l’enchainement des actions. Je trouve que pour une lecture de type thriller c’est vraiment très dommage car c’est vraiment important dans ce genre de bouquin d’avoir un récit qui tient fort la route, où l’auteur fait preuve de savants effets pour nous faire avaler toutes sortes de couleuvres et qu’on acquiesce avec enthousiasme.
      Ca reste sympathique et prenant à lire, mais j’ai aussi trouvé ça crispant du coup.

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  3. J’ai eu du mal aussi avec la fin, avec des éléments trop gros, pas logiques en particulier concernant la mère de Nell. J’ai beaucoup aimé l’idée de départ et la mise en place puis après ça a fait plouf…

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    1. Oui bien d’accord sur la mère, on ne comprend pas bien pourquoi elle a fait ces choix, mis à part pour que le scénario se déroule comme prévu. J’ai aussi trouvé que les suites de l’incendie étaient vraiment gérées pour que tout se déroule parfaitement pour les personnages. Entre autres choses.

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      1. Tout à fait. Surtout que quand tu y réfléchis, la police n’a visiblement pas trouvé étrange de ne pas trouver de trace de corps dans l’incendie.
        Quand tu ajoutes ces détails ensemble, ça rend la fin vraiment imparfaite. C’est dommage car le reste est vraiment bien

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  4. Houhou. Dommage. C’est vrai que c’est tentant, comme pitch.
    (J’ai bien lu les mots « le même bouquin pendant 7 semaines », « insomnies » et « acouphène ». Gloups. Te dire « total soutien » et « ghost hug », ça peut être utile? J’espère que ça va mieux.)

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  5. Pour moi tout est passé sans soucis, pourtant je suis souvent regardant sur les facilités mais là cela ne m’a pas dérangé… comme quoi nous sommes vraiment tous sensiblement différents dans notre sensibilité. Ou alors il faut juste lire le bon livre au bon moment !

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  6. Je l’ai terminé hier soir, et j’ai adoré 😁 Mais je comprends ce que tu veux dire sur les éléments bancals, mais j’ai réussi à ne pas les laisser ternir mon plaisir de lecture.

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  7. Dommage 🫤 ce sont des choses qui arrivent…
    « trainer le même bouquin pendant 7 semaines » : mince, pour le coup je ne pensais pas que ça pouvait t’arriver… j’espère que tes insomnies et tes acouphènes te laissent un peu plus tranquille depuis, et que tu as retrouvé une bonne lecture !

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  8. Je n’en reviens pas que cela fasse tant de mois qui ont passé depuis ma dernière venue ici. Le temps me file entre les doigts… (en dehors des périodes de congés, je suis aux abonnés absents).
    Bref

    C’est vrai que le pitch vend du rêve et donne envie de se lancer dans ce roman. Cela arrivera peut-être malgré tes bémols (que j’aurai sûrement oubliés d’ici là ^^)
    Bon courage pour les acouphènes (j’ai des périodes avec aussi…) et le reste

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