Un dragon de bibliothèque | Eversion, Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, La mer de la tranquilité

Ce billet pour vous partager les lectures que j’ai faites ces derniers mois de grande inactivité bloguesque. Possiblement (ou pas, l’avenir est incertain) la première édition d’un format récurrent qui me permettrait de parler en format court de certaines de mes lectures car, il faut se rendre à l’évidence, je n’ai plus la même force de frappe qu’avant en matière de chroniques mais j’aime bien vous partager mes lectures tout de même. 

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Eversion, Alastair Reynolds 

Silas Coade est médecin à bord du Demeter, une vaisseau de seconde zone qui navigue vers le Nord en longeant la côté norvégienne. Il fait partie d’une expédition orchestrée par un riche mécène en quête de gloire. L’objet de cette expédition est la découverte et l’exploration d’un mystérieux édifice.

Eversion a tout du récit d’aventure maritime, du moins en apparence. Il démarre de façon assez classique avec des gimmicks qu’on attendrait dans ce genre de récit. L’histoire prend une tournure inattendue à l’issue du chapitre 6 et continue de nous plonger dans des abymes de perplexité jusqu’à ce que l’explication de tout ce chimili nous soit révélée.

La dite explication ne m’a pas outre mesure surprise, même si je ne l’avais pas devinée. Plus intéressante fut la tournure prise par le récit dans son dernier tiers, suite à cette révélation. D’une part le récit prend une forme purement science-fictive d’une logique extrêmement bien ficelée, d’autre part l’auteur réussit le pari de nous émouvoir en poussant l’objet de son intentionnalité narrative (que je ne vous révélerai pas ici)(la formulation est chelou mais je me comprends, alors faites un effort) à son paroxysme. Une belle réussite.

Publication en 2023 chez Le Bélial. Traduction de Pierre-Paul Durastanti.


Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, Jeannette Winterson

Ce roman qui ne paie pas de mine à la couverture anodine et au titre évocateur est l’autobiographie de l’autrice Jeannette Winterson. Adoptée, elle a grandi dans une famille de la classe ouvrière d’une petit ville anglaise, entre une mère tyrannique et toxique et un père soumis et complètement effacé. Au travers de ce roman, elle raconte son enfance désastreuse, comment les livres, la poésie et la littérature l’ont sauvée et la quête de sa mère biologique dans les affres de l’âge adulte.

J’ai demandé à ma mère pourquoi nous ne pouvions pas avoir de livres et elle a répondu : « le problème avec un livre, c’est qu’on ne sait jamais ce qu’il contient avant qu’il ne soit trop tard. »

J’ai arpenté ce livre hautement émotionnel mais aussi intellectuellement passionnant en notant toutes les citations que je pouvais. Habituellement quand je repère une citation dans un livre, je mets un trait en face du passage concerné et note la page sur la première page du livre. Ce livre m’a été prêté, j’ai donc noté consciencieusement sur un postit – qui est devenu 2 au fil de ma lecture – la page et les premiers mots, pour pouvoir retrouver la citation facilement. J’en mets 4 ici car il faut savoir être raisonnable dans la vie (sort of).

Une vie difficile a besoin d’un langage difficile – et c’est ce qu’offre la poésie. C’est ce que propose la littérature – un langage assez puissant pour la décrire.
Ce n’est pas un lieu où se cacher. C’est un lieu de découverte.

encore : 

La fiction et la poésie sont des médicaments, des remèdes. Elles guérissent l’entaille pratiquée par la réalité sur l’imagination.

ou encore :

Quand j’ai connu le succès, plus tard, et qu’on m’accusait d’arrogance, j’aurais voulu trainer à Accrington tous ces journalistes qui n’y comprenaient rien, et leur montrer que pour une femme, une femme de la classe ouvrière, vouloir être écrivain, un bon écrivain, et croire que l’on avait assez de talent pour cela, ce n’était pas de l’arrogance ; c’était de la politique.

Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? est un livre intransigeant qui parle de résilience par la littérature. Il est aussi un petit bijou d’écriture.

Publication en grand format aux éditions de l’Olivier en 2012, lu dans le format poche chez Points. Traduit par Céline Leroy.


La mer de la tranquillité, Emily St. John Mandel

J’ai enfin lu mon premier Emily St. John Mandel ! Et comment dire… Euh… Bof ?

Une fois n’est pas coutume, je vous mets la quatrième de couverture parce que flemme :

Quel est cet étrange phénomène qui semble se produire à diverses époques et toujours de la même façon ? Dans les bois de Caiette, au nord de l’île de Vancouver, des gens entendent une berceuse jouée au violon, accompagnée d’un bruissement évoquant un engin volant qui décolle. L’expérience est intense mais brève, au point que l’on pourrait croire à une hallucination. En 2401, sur une des colonies lunaires, l’institut du Temps veille à la cohésion temporelle de l’univers. Une brillante physicienne nommée Zoey s’interroge sur des anomalies qui la perturbent. Le monde tel qu’il existe ne serait-il qu’une simulation ?

Ce livre se lit très facilement, il est prenant, fonctionnel d’un point de vue narratif et divertissant. Il est aussi sans relief et sans profondeur. A mon sens, un roman que l’on peut lire pour se changer les idées ou passer le temps, ce qui en soi n’est pas si mal. Sauf que j’attends un peu plus d’une lecture.

Je suis désappointée car j’entendais tellement de bien de l’autrice, ça remet les choses en perspective. Je pense cependant lui donner une seconde chance avec Station Eleven, sans doute son roman le plus connu. Mais s’il me fait le même effet que celui-là, je me ferai à l’idée que cette autrice n’est pas pour moi.

Roman à paraitre fin aout 2023 chez Rivages. Traduit de l’anglais par Gérard de Chergé.


Origine de l’image qui illustre ce billet.

27 commentaires sur « Un dragon de bibliothèque | Eversion, Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, La mer de la tranquilité »

  1. De toute façon la longueur des chroniques c’est comme la longueur des textes, ce n’est pas la taille qui compte.
    Je lirai « Eversion » un jour, c’est certain. J’en suis beaucoup moins sûr pour « La mer de la tranquillité ». Je me disais qu’il faudrait que je réessaye l’autrice mais ce que tu en dis m’évoque énormément ce que j’avais ressenti à la lecture de « Station Eleven ». 😅
    Et je comprends ton besoin de noter des citations pour le Jeanette Winterson, celles que tu donnes ont des airs d’aphorismes.

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    1. Oui c’est vrai, c’est vrai d’ailleurs j’aime beaucoup suivre un blogueur qui publie des chroniques aussi courtes que pertinentes, 233°C, je sais pas si tu connais ?
      « ce que tu en dis m’évoque énormément ce que j’avais ressenti à la lecture de « Station Eleven  » Ha. Eh bien, c’est mal engagé XD Enfin je pense que j’essaierai quand même, histoire d’en avoir le cœur net

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      1. Le début de ta phrase m’évoquait vaguement quelque chose, mais ce à quoi je pensais ne colle pas avec ton utilisation du mot « pertinent ». 😇
        Parfait, j’avais peur de t’en dégoûter, je te laisse l’honneur de tester pour savoir si je lui redonne à mon tour une seconde chance. ^^

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        1. Pfff…. De toute façon c’est pas toi qui décides [insérer gif de la petite fille en colère qui agite sa brosse à cheveux]
          J’espère que tu n’es pas trop pressé. Malheureusement il n’existe pas en audio livre en français, sinon je lui aurais fait son affaire plus rapidement.

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  2. À la lecture de ta chronique sur le livre « Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? », j’ai envie de le lire. Ça me parle, bien que je n’ai pas été adoptée. Mais je me suis posée la question un jour il y a longtemps.
    Ce n’est pas le nombre de tes chroniques qui importe, c’est leur qualité, et là tu excelles.

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  3. Je suis dans La Mer de la Tranquillité et j’adore le ton, l’écriture, l’histoire (il me reste 50 pages pour donner un avis définitif) mais je suis fan de l’autrice.
    Je trouve que ce roman est diffèrent des précédents dans sa construction narrative (beaucoup plus linéaire !) et il est beaucoup plus accessible.

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    1. Très intéressant retour. J’ai l’impression qu’on a souvent des avis assez opposés sur les livres qu’on lit XD (après sur l’accessibilité, je suis très d’accord, je n’ai pas d’élément de comparaison avec les autres romans de l’autrice mais de façon générale ce livre est accessible).

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  4. Ah mince, J’ai le Mandel aussi, et comme toi vu les caisses qu’on en fait j’en attends pas mal…
    Je le lirai pas mais j’adore les citations que tu as choisies du Winterson.

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  5. Super pour Eversion et pour Pourquoi être heureux (que tu aurais pu crayonner, je n’ai pas prévu de le récupérer 😉)
    Pour Emily St. John Mandel tu ne m’aides pas dans ma résolution de découvrir ses écrits 🤣

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  6. C’est très bien, de publier des chroniques courtes! Je suis ravie de te lire et j’en publie moi-même… J’adore aussi ça chez Grominou, elle est toujours très rapide mais ça ne manque ni de précision ni de profondeur. 😊
    Je ne lirai sans doute jamais Éversion, j’ai l’impression que je ne comprendrais rien ^^ Par contre, tu donnes très envie pour Pourquoi être heureux!

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  7. Super de te lire, et en format court c’est très bien 😊
    Eversion était chouette, mais je l’ai trouvé long sur la première moitié.
    Dommage pour La Mer de la tranquillité, le résumé et la couverture m’auraient plutôt donné envie. J’ai Station Eleven dans la pile depuis un bout de temps, mais en VO… ça me fatigue de lire en VO maintenant, alors ce ne sera pas pour tout de suite…
    Et tu donnes envie de lire Pourquoi être heureux, les citations sont parlantes.

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    1. De toute façon je ne suis pas sûre que ce soit par celui-là qu’il faille commencer pour St John Mandel, les bouquins semblent avoir des liens entre eux et celui-là se réfère à un précédent. Ce n’est pas du tout gênant pour lui mais je me dis que peut être que ça explique l’engouement (que je ne comprends pas XD) pour cette autrice.
      C’est très chouette Pourquoi être heureux, je dois le prêter à Alys mais il peut tourner après.

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  8. J’ai 2 romans (dont celui présenté) de Jeannette Winterson dans ma bibli depuis des lustres. Je l’avais commencé d’ailleurs mais pas dans le mood, je l’avais posé et jamais repris… Pt’être que tu vas me convaincre de le retenter.

    J’aime bien le format des avis courts et si ça te convient, ce sera un plaisir de les voir fleurir ici 🙂

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    1. Il est vraiment bien, une lecture très marquante. Il en fleurit surtout pour ce qui n’est pas la littérature mais un peu de livres aussi, j’ai déjà deux titres pour lesquels je ne pense pas faire de billet long.

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