La fille automate | Emiko

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Impressions.
Un crash énergétique a déstabilisé le monde tel que nous le connaissons : sans pétrole, l’homme se tourne vers une source énergétique inépuisable mais coûteuse : celle produite par l’effort humain ou animal et stocké sous forme de piles. Le crash n’est pas uniquement énergétique mais aussi alimentaire. Le monde est à la merci de compagnies biotechnologiques qui sont seules capables de fournir des produits qui peuvent résister aux virus en constante mutation : la cibiscose et la rouille vésiculeuse. La Thaïlande échappe à cet état, protégeant jalousement sa banque de semences des multinationales, comme elle protège sa cité sainte Krung Tep de l’inondation.

Il est difficile de voir la cité des êtres divins autrement que comme un désastre en devenir. Mais les Thaïs sont entêtés et se sont battus pour protéger de la noyade leur cité sainte de Krung Thep. A l’aide de pompes alimentées au charbon, du barrage et d’une fois profonde dans la conduite visionnaire de la dysnatie Chakri, ils sont jusqu’à présent parvenus à retenir ce qui a englouti New York et Rangoon, Mumbai et la Nouvelle-Orléans.

Dans ce background poussé et, malheureusement pour les générations à venir (et peut-être pour nous aussi déjà) fort réaliste, on suit l’histoire de différents personnages : Anderson, occidental aux dents longues qui travaille pour le compte d’une grosse multinationale et qui voit dans la banque de semences des Thaïs une mine d’or dont il faut s’emparer ; Hock Seng, contre-maître yellow-card (réfugié malais au statut particulièrement précaire) dans l’usine de piles gérée par Anderson ; Jaidee, capitaine des « chemises blanches », force du Ministère de l’Environnement qui terrorise la ville et accumule les pots-de-vin, ainsi que Kanya, son lieutenant. Et bien sûr Emiko, la fille automate, créée pour satisfaire les désirs des hommes. Abandonnée en Thaïlande par son maître japonais, elle se retrouve dans un bordel sordide où elle perd chaque jour sa dignité. Jusqu’à ce qu’on lui parle des automates qui vivent libres dans les montagnes.

Mizumi-sensei les a tous présenté à Misuko Jizo Bodhisattva, dont la compassion s’étend même au Nouveau Peuple, et qui les cachera dans ses manches après leur mort et les fera sortir de l’enfer des jouets génétiquement conçus pour les mener dans le véritable cycle de la vie. Le devoir de servir, l’honneur de servir avec pour toute récompense une vie prochaine, devenir totalement humains. Servir apporterait la plus grande des récompenses.

Je me suis retrouvée plongée de la première ligne à la dernière dans ce monde si réaliste, si « possible » en regard de ce qui se passe actuellement dans le nôtre, qu’il en devient terrifiant. Non seulement d’être un roman passionnant, La fille automate est un roman important, tant il est anticipatif. Et l’intrigue d’avancer, lentement vers ce qui est inéluctable lorsque l’envie et le profit grandit dans le cœur des hommes. On peut à peine croire qu’il s’agit d’un premier roman tant il est aboutit. Il mérite bien en tout cas la panoplie de prix qu’il a reçus. Je vous en conseille vivement l’acquisition ; ce petit pavé vous hantera encore longtemps après lecture.

La bagarre s’étend dans la rue. Emiko ramasse les ordures pour s’en recouvrir. Derrière elle, du verre se brise. Quelqu’un hurle. Elle
se recroqueville contre une caisse démantelée de ToutTemps, assemblant des détritus autour d’elle, des pelures de durian, le chanvre arraché d’un panier, des feuilles de bananier, n’importe quoi pour la cacher. Elle s’immobilise et se baisse quand les émeutiers pénètrent dans l’allée en hurlant. Partout où elle regarde, elle ne voit que des visages déformés par la haine.

POUR ALLER PLUS LOIN

Publié en 2009
2012 pour la traduction française aux éditions Au Diable Vauvert.
Traduit de l’anglais (USA) par Sara Doke
Titre original : The Windup Girl
595 pages.
Une interview de l’auteur.
Ce roman a reçu le Prix Hugo du meilleur roman, le Prix Locus du meilleur premier roman et le Prix John Wood Campbell Memorial en 2010.

14 commentaires sur « La fille automate | Emiko »

  1. Lecture en cours pour ma part, et après un début délicat (j'ai eu du mal à entrer dedans, et ai eu du mal à « cerner » les personnages et le contexte global, peut-être dû à un manque d'attention ou une certaine fatigue intellectuelle…), ça commence à s'emballer… et à m'emballer !

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  2. Je viens de lire le Faiseur d'histoire, et j'ai vérifié, j'avais dit à Cachou que je le lirais en 2011, donc je pense qu'il faut compter 1 à 2 ans pour que le livre arrive dans ma PàL à partir d'un article de blog 😛

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