Un gars et son chien à la fin du monde | Wouf !

Un gars et son chien à la fin du monde C.A. Fletcher

Un gars et son chien à la fin du monde est un roman de l’auteur écossais C.A. Fletcher et publié chez Nouveaux Millénaires. Sa parution est prévue pour le 26 août 2020. A partir d’un chien volé, on y suivra les aventures de Griz, à sa recherche dans un monde en ruines, vidé de ses habitants.

Apocalypse molle

Une fin du monde lente et propre a eu lieu : les êtres humains sont devenus stériles alors ils ont progressivement disparu. A quelques exceptions  près, comme la famille de Griz qui vit  sur une île au large de l’Ecosse, dans les Hébrides. Leurs plus proches voisins sont à quelques îles de là, ce qui tient limite du miracle étant donné le nombre d’habitants restant sur Terre (10 000 par là).

Un jour, ils ont disparu. Ni boum ni murmure. A la rigueur un soupir épuisé.

Une apocalypse molle, même si ceux qui l’ont vécue l’ont trouvée dure. Elle a eu lieu, et nous – ses ultimes vestiges toujours plus rares -, nous voilà seuls, coincés ici.

Leur vie est au final plutôt agréable quoique rustique (ce qui n’est pas forcément incompatible vous en conviendrez). Ils vivent de ce qu’ils produisent ou chassent et fouillent les îles alentours pour leurs besoins en pièces détachées. Seule ombre au tableau : la mort d’une sœur tombée d’une falaise et l’accident à la tête de la mère qui depuis ne parle plus, n’agit plus et a des interactions assez limitée avec son entourage.

Un jour un visiteur vient leur rendre visite : Brand. Il leur raconte les histoires de ses voyages. Il fait forte impression sur Griz. Mais dans la nuit il s’enfuit avec un de ses chiens, une chienne même : Jess. Et la chasse d’être lancée : Griz le poursuit avec l’énergie du désespoir en compagnie de son autre chien : Jip.

Dans un stade vide, personne ne vous entendra crier

Un gars et son chien à la fin du monde est un récit d’initiation et de passage à l’âge adulte avec les ingrédients classiques de ce type de récit. On a aussi un roman de littérature postapocalyptique assez caractéristique (mais zombie-free).

Mais C.A. Fletcher arrive à insuffler à ce récit plein de faux-semblants,  une âme, des émotions et une narration prenante.

Comment l’auteur s’y prend-il ?

Déjà le récit est à la première personne, par Griz, qui nous raconte son histoire à partir d’un présent situé dans le futur quand on commence à lire. Le personnage utilise un langage proche du langage parlé, ce qui a aussi pour effet de le rendre plus vrai, loin de tout artifice, un récit et des pensées un peu brutes de décoffrage.

Ensuite, Griz s’adresse à nous. Enfin pas directement. Plutôt à un garçon sur une photo, une photo du monde d’avant. Mais comme on est en train de lire son histoire, on se sent pris à parti directement.

Est-ce que l’absence a un poids ? Je crois que oui, car un fardeau m’écrase, invisible. C’est une impression beaucoup plus forte que celle ressentie face aux rues désertes, peut-être l’idée de tous ces gens choisissant de venir s’amasser dans un seul lieu. Non, les fantômes, ça n’existe pas. Rien ne hante ce stade, sinon un souvenir : des gens l’ont peuplé, voire surpeuplé, et le voici dépeuplé – au sens où quelque chose n’est défait qu’après avoir été fait. C’est l’atmosphère que je m’efforce de saisir depuis que j’ai mis le pied sur la terre ferme. Elle diffère du vide de l’absence. J’y vois plutôt de la solitude, non pas la mienne, mais celle du monde privé de vous tous. Il vous a connus, et vous avez disparu. Et pendant un certain temps, peut-être jusqu’à ce que s’effacent les signes de votre présence, vos maisons, vos routes, vos ponts, vos stades de foot, tous réabsorbés par la nature, vous lui manquerez.

Griz voyage dans les ruines d’une civilisation qui a été la nôtre. Il y a un côté urbex et nature writing  à ses pérégrinations. Cela m’a un peu évoqué un autre bouquin postapo que j’avais beaucoup aimé La constellation du chien de Peter Heller (dans lequel il y a un chien aussi).

Un dernier livre avant la fin du monde

Un autre point qui m’a enthousiasmée, c’est que Griz a beaucoup lu. Nos livres, parce que forcément je vous laisse imaginer qu’avec 10 000 êtres humains sur la planète, le secteur de l’édition n’est pas au meilleur de sa forme. J’ai trouvé ça vraiment cool d’inclure les livres à un récit postapo, je trouve que ça manque la plupart du temps. Alors que dans un monde privé d’ordinateur et d’Internet c’est là que se trouve la connaissance, pratique, technique mais aussi du monde d’avant. Le reste de la famille lit des livres techniques, pour faire son potager par exemple. Mais Griz a la particularité de lire aussi des livres de fiction. Livres qui nous sont abondamment mentionnés, quoi que le namedropping soit plus léger que dans Morwenna de Jo Walton. On y trouvera Astérix, ou Don Quichotte mais aussi des livres de science-fiction comme Un cantique pour Leibowitz ou La route.

Je sais bien qu’on ne peut pas éprouver de nostalgie pour ce qu’on n’a jamais connu, mais c’était ce sentiment que les livres m’évoquaient le plus souvent.

Un gars et son chien à la fin du monde est un récit initiatique postapocalyptique. On parle entre autre de la nostalgie d’un monde qui n’existe plus, de chiens, de la famille et de littérature. Entre urbex et natural writing, on y voyage en bateau, à pied ou à cheval et on y rencontre de rares humains. Une bien belle histoire.

Informations éditoriales

Roman écrit par C.A. Fletcher. Publié pour la première fois en 2019. 2020 pour la traduction française chez J’ai Lu Nouveaux Millénaires. Traduit de l’anglais (Ecosse) par Pierre-Paul Durastanti (bravo :)). Titre original : A boy and his dog at the end of the world. Illustration de couverture par Studio J’ai Lu d’après Shutterstock/ Maria Belle, AVN Photo Lab, Nadia Grapes, Libor Piska, Oceloti. 347 pages.

Pour aller plus loin

Mes impressions : La constellation du chien, Peter Heller. Morwenna Jo Walton.
D’autres avis : Le Bibliocosme, Pativore, Les critiques de Yuyine, RSF blog, Au pays des cave trolls, Mondes de poche, Navigatrice de l’imaginaire, ou signalez-vous en commentaire.

challenge summer short stories of SFFF 2020

51 commentaires sur « Un gars et son chien à la fin du monde | Wouf ! »

  1. Totalement hâte de le lire ce titre, j’étais déjà très frustrée qu’il soit repoussé – mais bon, comme beaucoup de titres l’ont été aussi.
    C’est en tout cas la première chronique que j’en lis et comme elle est positive, c’est parfait.
    Le namedropping dans Morwenna t’avait un peu gêné/agacé ?

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  2. « de l’auteur « . ..dans,l’intro
    Curieux cette envie de lire des récits post apocalyptique ces derniers temps. Je ne vois vraiment pas d’où cela vient. Peut-être envie d’avoir un chien 😛
    Je suis passé à un autre registre…mais ça a l’air bien.

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  3. Ça l’air sympathique. J’espère que le chien survit à tout ça, mais ça n’a pas l’air dramatique donc j’ai bon espoir.
    « Je sais bien qu’on ne peut pas éprouver de nostalgie pour ce qu’on n’a jamais connu » –> Je crois que si 😕 Je me demande si ça a un nom ou si c’est juste « la nostalgie de ce qu’on n’a pas connu »…

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    1. Je ne dirai rien.
      Il y a une deuxième partie à cette phrase 😉  » mais c’était ce sentiment que les livres m’évoquaient le plus souvent. » et c’est également ce que montre une bonne partie de ce livre. Pas connaissance que ça porte un nom, mais s’il y en a un je veux bien le connaître

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        1. Je te charrie ^^ Pas du genre à reprocher aux gens de pas aimer tel ou tel livre. Même si ça me rend triste un peu 😦

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  4. Je. Sais. Pas. Il n’y a rien qui m’attire particulièrement, mais rien qui me rebute vraiment non plus – vu que ça a l’air un post-apo soft. Peut-être.
    « On y trouvera Astérix, ou Don Quichotte mais aussi des livres de science-fiction comme Un cantique pour Leibowitz ou La route » : je sens poindre une thématique. ^^

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  5. Lu avec plaisir. Bien sûr il faut s’adapter au début c’est un peu laborieux,mais après on passe par toutes sortes d’émotions, de très belles réflexions. C’est très bien narré et le namedropping ne m’a pas gênée (contrairement à la lecture de Morwena, je précise que j’aime beaucoup Jo Walton malgré cela)
    Donc c’est un roman qui m’a touchée.

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