Shining in the dark | Stephen King brille-t-il dans le noir ?

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Shining in the dark est une anthologie regroupant 12 textes écrits par 13 auteurs différents. Publiée en français chez ActuSF en octobre 2020, elle célèbre les 20 ans d’existence d’un site de fans de Stephen King, Lilja’s Library. Poussons la porte prudemment et emboitons le pas de ces auteurs parmi lesquels on compte Stephen King lui-même ou le célèbre Clive Barker …

Un anniversaire

Cette anthologie fut publiée initialement en 2017 pour célébrer les 20 ans d’existence de Lilja’s Library, un gros site de news et d’infos sur Stephen King en anglais. L’idée était de rassembler des noms plus ou moins connus du fantastique horrifique autour de textes courts pour rendre hommage au King de l’horreur. Celui-ci y va même de son grain de sel puisqu’il signe la première nouvelle. L’anthologiste, Hans-Åke Lilja, explique ses intentions dans une introduction ; la postface faisant office de remerciements.

En fin d’ouvrage, on trouvera, pour chaque nouvelle, une note d’intention de l’auteur (enfin sauf pour le texte de Poe vous imaginez bien, qui est donc explicité par un tiers non nommé, je suppose l’anthologiste). Je trouve ça très appréciable, il est toujours intéressant de se plonger dans la genèse d’un texte et comment son auteur le perçoit et vu l’éclectisme des thématiques, cela permet de remettre de l’ordre dans l’anthologie.

12 textes, 13 auteurs (dont 1 autrice, hum). Du bon, du moins bon. On décortique Shining in the dark ensemble.

Les nouvelles

Le compresseur bleu : un récit horrifique, Stephen King. Un écrivain en villégiature est fasciné par son énorme logeuse. Il écrit une nouvelle à son sujet mais elle va tomber dessus. J’ai trouvé ce texte vulgaire et sans grand intérêt. Il y a bien les adresses que King fait au lecteur mais on ne comprend pas vraiment le but de cette démarche. A noter que ce texte oublié (à bon escient?) depuis des lustres en langue anglaise, était inédit en français.

Le réseau, Jack Ketchum & P.D. Cacek. Un homme et une femme discutent par messages sur Internet et tombent amoureux. Sauf que l’un et l’autre ne disent pas toute la vérité. L’échange se produit en 2003, le copyright de la nouvelle date de 2006. Cette nouvelle me semble complètement dépassée par la technologie, ça fait 20 ans que des couples se forment sur le Net maintenant, peut-être paraissait-elle originale à l’époque ? J’ai trouvé ça extrêmement prévisible.

Le roman de l’Holocauste, Stewart O’Nan. Il m’aura fallu lire les intentions de l’auteur pour comprendre où il venait en venir. Il s’agit de montrer l’auteur, non pas comme une personne mais comme une abstraction, un concept qu’il porte par ses livres à tel point qu’il efface l’individu. La proposition est intéressante, la réalisation moins. « Fail faster » comme on dit dans mon métier. Try again.

Aeliana, Bev Vincent. Aeliana n’est pas totalement humaine mais pas totalement animale non plus. Elle se lie télépathiquement avec une policière sur la trace d’un tueur en série. Une nouvelle touchante dont le background semble trop grand pour le texte.

Charabia et Theresa, Clive Barker. D’un humour caustique, ce texte met en scène un saint pédophile, 1 tortue et 1 perroquet ainsi qu’un ange. C’est drôle et irrévérencieux, j’ai beaucoup aimé.

La fin de toutes choses, Brian Keene. Nous sommes dans les pensées d’un homme qui a perdu son fils et sa femme. Il est dans l’incapacité de faire cet horrible deuil mais n’arrive pas à mettre fin à ses jours, alors il imagine toutes les fins du monde possible pour en finir. Cette nouvelle est très sombre montre l’écroulement du monde que l’on peut ressentir face à la perte d’un enfant. Je n’ai pas d’enfant mais l’auteur sait parfaitement retranscrire cette angoisse. Très réussi.

La danse du cimetière, Richard Chizmar. L’auteur le dit lui-même dans ses intentions : ce texte est assez banal. L’histoire d’un homme qui a tué sa femme et se rend sur sa tombe au cimetière en pleine tempête de neige pour la rejoindre. Un texte d’ambiance très court qui ne laisse pas un impérissable souvenir.

L’attraction des flammes, Kevin Quigley. 3 garçons se retrouvent enfermés dans la maison hantée d’une fête foraine et cela tourne au cauchemar. Une longue nouvelle très efficace, très kingienne, qui joue également sur la lépidophobie (avis aux amateurs). Je ne suis juste pas très fan du trope de la fête foraine.

Le compagnon, Ramsey Campbell. Evidemment, il suffisait que je me rappelle que je n’aime pas trop le trope horrifique de la fête foraine avec la nouvelle précédente, et que nous offre celle-ci ? Une ambiance de fête foraine. On est dans la tête d’un mec qui souffre visiblement d’un trouble anxieux. Il imagine des scénarios catastrophes à chaque situation, un mécanisme que je ne connais que trop bien. Mais si le pire restait à venir ?

Le cœur révélateur, Edgar Allan Poe. Un homme planifie le meurtre de son maître et sombre dans la folie. Texte court à l’efficacité folle, si je puis dire. J’ai bien aimé la chute, elle était rigolote. Ce texte est mentionné dans la nouvelle de King qui dans l’après-coup apparait comme un hommage direct. Mais pourquoi tant de vulgarité ?

L’amour d’une mère, Brian James Freeman. Que ferait-on par amour pour sa mère ? La nouvelle se passe dans une maison de retraite, plutôt genre ambiance mouroir pour grabataires que club med du troisième âge. Ca aurait pu fonctionner mais le twist final ne m’a pas surprise.

Le Manuel du Gardien, John Ajvide Lindqvist. Un ado découvre le jeu de rôles du L’appel de Cthulhu et entreprend d’y initier ses amis. Plus intelligent que la moyenne, il éprouve un certain mépris face au reste du monde et en particulier par la tête à claques de sa classe, Oswald. Il y a un petit côté Stranger Things dans ce récit, mais la fin bifurque résolument dans une toute autre direction, ce qui n’a pas été pour me déplaire du tout.

La qualité des 12 textes de Shining in the dark est assez fluctuante. On regrettera particulièrement que le texte de King lui-même ne soit pas à la hauteur. Cependant, l’anthologie offre de très bons moments de lecture horrifiques. Sur 12 textes, 6 ont attiré mon attention : Charabia et Thérèsa, Aelinia, La fin de toutes choses, L’attraction des flammes, Le cœur révélateur et Le manuel du gardien.

Informations éditoriales

Anthologie publiée sous la direction d’Hans-Åke Lilja ; Sébastien Guillot pour la publication française. Publié chez ActuSF en 2020. Traduit par diverses personnes : Annaïg Houesnard, Eric Holstein, Jean-Daniel Brèque, Baudelaire. Titre original : Shining in the dark. Illustration de couverture par Zariel. 420 pages.

Pour aller plus loin

Lilja’s Library.
Une interview de Hans-Åke Lilja à propos de l’anthologie sur le Club Stephen King.
D’autres avis : Un papillon dans la lune, Au pays des cave trolls, L’imaginarium électrique, Le Bibliocosme, Les pipelettes en parlent, La bibliothèque d’Aelinel, L’imaginaerum de symphonie, Les lectures de Xapur, Cat(s), books and rock’n roll, ou signalez-vous en commentaire.

The maki project

32 commentaires sur « Shining in the dark | Stephen King brille-t-il dans le noir ? »

  1. Ca fait si longtemps que je n’ai pas lu du King… et justement parce que depuis quelques années, c’est très inégal. Alors forcément une anthologie, c’est pire…Mais c’est toujours intéressant, justement parce que ça peut donner envie de découvrir d’autres auteurs autour. J’en ai noté quelques uns.

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  2. Avis partagé sur la plupart des nouvelles (notamment celle de King), sauf pour Teresa et Charabia à côté de laquelle je suis complètement passée 🙂

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  3. Proposer une mauvaise nouvelle pour un livre hommage, ça c’est de la modestie.
    C’est sympa les notes d’intention, ça devrait être systématique dans les anthologies. C’est juste dommage que Monsieur Poe ne se soit pas prêté à l’exercice, certains prennent vraiment la grosse tête avec la célébrité. 🙈

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    1. Ca fait plus je racle des fonds de tiroir je trouve mais bon XD
      Oui je trouve aussi que ça devrait être systématique, dans les recueils un peu foutraques aussi d’ailleurs :p
      J’ai entendu dire que Poe avait fait le mort lorsqu’on lui a posé la question, donc voilà.

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  4. Je n’ai pas aimé non plus la nouvelle de Stephen King.
    Je ne suis pas sûre pour Aeliana, mais il me semble avoir lu qu’il y avait eu d’autres choses écrites (avant ou ensuite).

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  5. Dommage que ce ne soit pas génialissime. J’ai un peu a priori négatif sur les anthologies hommages, mais en réalité il n’y a pas de raison que ce soit mauvais.
    « enfin sauf pour le texte de Poe vous imaginez bien » et « J’ai entendu dire que Poe avait fait le mort lorsqu’on lui a posé la question, donc voilà » –> Mais LOL. 😂😂 Je crois que j’avais bien aimé ce texte de Poe, mais j’ai juste noté « il est un brin inquiétant » sur le blog…
    Dis-moi, est-ce que Charabia c’est le nom du perroquet? 🤩
    Très classe, d’avoir Baudelaire dans la liste des traducteurs!

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    1. C’était ma première je crois 🤔
      Huhu
      Oui c’est le nom du perroquet 😀
      Je me suis fait la même réflexion pour Baudelaire. Voilà un auteur classique qui ne se fera sans doute jamais retraduire, personne n’oserait se frotter à la plume de Baudelaire :p

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      1. Eh bein… si, en fait! Aussi étonnant que ça puisse paraître. J’ai découvert ça dans une émission de la Compagnie des auteurs sur Poe: je ne sais plus ce qui lui était reproché, mais apparemment les traductions de Baudelaire ne sont pas géniales. Il y a actuellement deux retraductions en cours (une chez Bouquins je crois, l’autre je ne sais plus du tout). Il y avait quelques comparatifs dans le dernier Translittérature (la revue de l’Asso des traducteurs littéraires de France) et l’extrait de Baudelaire était, en effet, décevant: un dialogue entre un blanc libre et un esclave noir aux expressions très différentes était exactement sur le même niveau de langue en français. C’est horrible à traduire, les langues particulières (ici, le parler de l’esclave), mais il faut chercher un truc pour montrer que les deux persos ne parlent pas de la même façon… Enfin, c’est une vaste question, et la traduction n’était pas aussi théorisée à l’époque, ça explique sûrement en partie. Moi, Baudelaire dans la liste des traducteurs, j’adore! 🤩

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    1. Si tu peux la trouver, je pense que la nouvelle Le manuel du gardien peut carrément te plaire: jeu de rôles + lovecrafterie + une fin inattendue = combo gagnant. Elle n’est pas vraiment horrifique, c’est plus du fantastique légèrement inquiétant.

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    1. Ce n’est pas indispensable je pense. Il y a des thématiques similaires dans certains des textes mais le lien ne m’a pas paru forcément très évident.
      De rien et bonnes lectures 🙂

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