Anthologie officielle des Utopiales 2022

L’anthologie officielle des Utopiales 2022 a été publiée, comme d’habitude chez ActuSF. Elle contient une note d’introduction de Jérôme Vincent et 13 nouvelles, sur la thématique du festival : Limites. Je vous livre mes impressions sur ces 13 textes.

Cargo, Saul Pandelakis

Dans Cargo, d’immenses créature servent de transport pour le voyage spatial. Seti vit dans une station d’affrêtement, on suit son quotidien.

J’ai lu ce texte deux fois à quelques semaines d’intervalle. Il faut avouer que le background est si riche pour si peu de pages que je me suis sentie submergée et à côté de la plaque. Une lecture dans le métro n’a pas aidé.  Beaucoup de notions, de néologismes à appréhender, pas forcément expliqués (ce qui n’est pas un défaut, justement Saul Pandelakis mise sur l’intelligence des lecteurices).

En fait, cette nouvelle est incroyablement triste et touchante et j’en reviens pas d’être passée à côté à la première lecture.

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A cœur suspendu, Emilie Querbalec

Dans le futur, un couple décide d’avoir un enfant in utero alors que la norme est au ex utero. L’autrice nous raconte le déroulé de la grossesse sur un ton très doux bien que tout ne se passe pas au mieux… Parcours du combattant d’un couple qui décide coûte que coûte de donner naissance à un enfant présentant de graves problèmes cardiaques, aisément et précocement détectables à l’échographie.

Un texte qui parle de maternité et d’une abnégation qui me dépasse un peu.

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Tarbh dans le labyrinthe, Aurélie Wellenstein

L’autrice revisite les mythes du minotaure et d’Icare avec son personnage de Tarbh, petit-garçon-taureau, prisonnier d’une usine labyrinthique dont il cherche la sortie en s’en tatouant le plan sur le corps.

Une relecture twistée du mythe, agréable à lire, mais j’ai trouvé la fin très plate.

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L’île, Jean-Marc Ligny

Dans la  région de Tahiti, les insulaires sont évacués car les îles deviennent inhabitables à cause de la montée du niveau de la mer. Un vieux  refuse de partir car il préfère mourir sur son île que de survivre dans un camp de réfugiés. Un fois tout le monde parti, il se rend compte que les voisins sont partis sans leur chat.

Une nouvelle qui alerte de façon réaliste sur les conséquences du réchauffement climatique pour les populations insulaires. C’est assez déprimant mais au moins ça finit bien, ce qui n’est pas si courant chez Jean-Marc Ligny.

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Conte du Loup qui devint Corbeau, Morgan of Glencoe

Ce texte se passe dans le même monde postapocalyptique que La piste des oiseaux (anthologie des Utopiales 2020) que j’avais beaucoup aimée. Elle est aussi disponible en numérique Club de la nouvelle d’ActuSF pour moins de 2€. Je suppose que celle-ci finira par y être disponible également. Elle propose une origin story à un personnage de La piste des oiseaux.

L’ambiance a une touche médiévale. On est dans une Bibliothèque et des Copistes recopient des livres. Blaise et La Fayette sont des apprentis et, pour leur examen, ils doivent recopier un document-source. Au cours de cet examen qui durera 8 mois, Blaise va être amené remettre en question le bien-fondé de la Bibliothèque qui, sous prétexte de conservation du Savoir qu’elle garde enfermé dans ses murs, fait souffrir d’autres personnes.

Une lecture émouvante qui cite plusieurs textes que nous connaissons bien et met en avant l’importance de la diffusion du savoir en mettant en scène un lieu dont le but initial a été dévoyé.

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Coup d’œil, Julien Heylbroeck Caldironi

Deux éboueurs de la Hanse nettoient les déchets de l’Architeutis, quand ils décident de se faire un peu de blé supplémentaire en faisant de la contrebande de déchets organiques à haute valeur alchiformatique. Leur exploration va les amener à une découverte de taille.

Une nouvelle au background intéressant dans un univers qui mêle science-fiction et alchimie. Le texte s’inscrit, sans surprise, dans un univers plus vaste exploré dans le roman Lazaret 44. Un peu gluant et suintant tout ça, bon appétit.

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Icare Hermétique, Hugo Bellagamba

Dans un futur dystopique, on envoie les repris de justice sur Mercure pour y farmer du platine. Pour se faire, ils doivent subir une transformation qui en font des sortes de vampires modernes : ils se consument à la lumière et se nourrissent de sang.

Brillante et terrible nouvelle qui parle d’aliénation et d‘absence totale d’espoir. Par contre, ce texte aurait eu davantage sa place dans l’anthologie de l’an dernier qui avait pour thématique transformations, ce d’autant qu’il était déjà paru dans une anthologie en 2013 😅

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La maman de Martin, Morgane Caussarieu

Martin aime sa mère, trop ? Madeline aime son fils, pas assez ?  Une relation extrêmement dysfonctionnelle entre un enfant et sa mère qui mène à une catastrophe sanglante.

Il s’agit du quatrième texte de l’autrice que je lis (Je suis ton ombre, Dans tes veines et Vertèbres pour les trois autres) et j’ai un peu l’impression  qu’elle racle jusqu’au sang les mêmes thématiques : des relations parent-enfant qui ne fonctionnent pas du tout, de l’absence à l’abus, des enfants qui tentent de s’adapter avec des moyens surnaturels pour un résultat pire encore. J’avais adoré Je suis ton ombre, mais là je sens que j’ai fait le tour de la question.

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Loup, y es-tu ?, Nicolas Martin

Lucie, Marie et Théo sont trois enfants qui passent l’été ensemble à s’amuser à des jeux d’enfants : se baigner, jouer au loup, explorer les environs, etc. Mais les failles se font rapidement sentir : qui est ce Nino, que font-ils dans cette cabane … ? Un twist final met en lumière le fin mot de l’histoire, sauf que je n’arrive pas trop à comprendre la logique narrative derrière tout ça, du coup, je ne sais pas ?

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Foudre, Floriane Soulas

Un crapahuteur assure la liaison de courrier entre Chicago et New Boston au milieu d’une nature hostile et de factions humaines qui le sont à peine moins (voire pas du tout). Il est suivi par quelque chose ou quelqu’un qui semble effrayer toute créature vivante autour de lui.

Une nouvelle sympathique qui ressemble  un premier chapitre de roman, ou une origin story de quelque chose de plus grand. 

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Les cartographes, Alexander Weinstein

Quimbly, Barret & Woods est une start-up florissante créée par les trois protagonistes éponymes. Ils vendent des souvenirs numériques, souvenirs qui sont testés entre autre par Woods, le narrateur de cette histoire. Suite à des critiques d’utilisateurs, ils sont amenés à faire plus de tests et Woods perd régulièrement le fil de la réalité : il ne parvient plus à faire la différence entre ses souvenirs à lui et ceux qu’il teste. En parallèle, il rencontre Cynthia, une fille résolument déconnectée de la technologie et en tombe amoureux.

Un texte prenant qui interroge le rapport aux technologies ultra-connectées qui ressemblent à s’y méprendre au réel. Peuvent-elles la remplacer ?

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Oniomaniac, Jean Baret

CAM-ille est une sorte de super-psy qui combat les névroses de ses patients de l’intérieur de leur psyché, à coup de références à la pop-culture. La thérapie de son patient actuel va lui donner du fil à retordre, invoquant Romera, Stephen King, Resident Evil et bien d’autres.

Cauchemar jouissif plein de rebondissements et de gore, Oniomaniac est à la fois drôle et critique de notre société de consommation, le terrain de prédilection de Jean Baret.

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Les maîtres des runes, Karine Rennberg

Karine Rennberg esquisse un univers de fantasy dans lequel des guerriers peuvent se laisser déborder par une sort d’esprit qui les habite et se transformer en animal sanguinaire qui tue tout sur son passage. Ils sont loyaux au Maître des Runes mais ils sont au centre d’enjeux de pouvoir…

J’ai bien aimé l’écriture, très fluide et imagée. Après, comme souvent avec les textes courts de fantasy, j’ai ressenti que l’histoire était un peu à l’étroit dans son format.

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Comment d’habitude avec les anthologies, il y a à boire et à manger et chacun trouvera (ou pas) son bonheur dans le gamelle en fonction de ses affinités avec les thématiques abordées et les auteurices au sommaire. Pour ma part, j’y ai trouvé mon compte avec 5 textes qui se démarquent malgré 4 textes qui n’ont pas parlé à mes pailles littéraires. Dans tous les cas, vivement l’an prochain, histoire de se mettre le nouveau menu sous la dent.

Informations éditoriales

Anthologie publié sous la direction de Jérôme Vincent chez ActuSF en 2022. Les auteurs et textes sont tous cités dans la chronique. Couverture par Marc-Antoine Mathieu. 333 pages.

Pour aller plus loin

Mes impressions sur les anthologies précédentes : 2021 – 2020 – 2019 – 2018 – 2017 –2012 – 2011 – 2010.
D’autres avis : Pages pluvieuses, Nevertwhere, ou signalez vous en commentaire.

17 commentaires sur « Anthologie officielle des Utopiales 2022 »

  1. J’avoue que la couverture me laisse de marbre, mais je suis amatrice de chatoyance alors ce n’est guère une surprise…
    Et pour l’instant, j’ai bien trop à lire pour me tourner vers une anthologie, même si Les Maîtres de Runes et Icare me tentent pas mal!

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  2. C’est « L’Ouest hurlant » qui t’a poussé à te replonger dans l’esprit festival ? ^^
    *jette un œil discret au tome 1 de la série de Morgan of Glencoe qui attend depuis des années dans la PàL* 🙈

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    1. Je ne suis pas allée à Ouest Hurlant ^^
      Non je l’ai lue car j’avais une ouverture, pas besoin de réelle raison, je lis cet antho quelque part entre après le festi et avant la prochaine édition depuis plus de 10 ans 😀

      Ha oui tiens, bonne idée, tu le sors quand ?

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  3. Je lirai l’anthologie des utopiales le jour où j’arriverai à y venir, na !

    Alors par contre, je pensais naïvement que les auteurices étaient sollicité.e.s pour l’occasion, pour écrire sur le thème choisi… ce que dément ta remarque sur Icare Hermétique 😲

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  4. Au moins quelques textes ont su t’accrocher et ravir tes « pailles » littéraires :p J’aime bien pailles au lieu de papilles, ça laisse entendre que tu as bu certaines histoires 🙂

    Ah j’aime bien aussi « écographie », mais vraiment, ça m’a fait sourire

    Sinon, faut que je lise Baret, ça fait un moment que je me le dis

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