Ce 113e Bifrost, publié en janvier 2024 par les éditions du Bélial propose un dossier sur Intelligence artificielle. Je m’intéresserai dans les présentes impressions aux 4 nouvelles qui ouvrent la revue, à savoir : Le charme discret de la machine de Turing de Greg Egan, Renaissance de Jean-Marc Ligny, RêveVille de Thierry Di Rollo et Rayée d’Audrey Pleynet. C’est parti…
Le charme discret de la machine de Turing, Greg Egan
La vie de Dan et Carlie alors que les emplois sont progressivement remplacés par des IA. Au travers de leur situation individuelle, c’est un bouleversement sociétal qui est à l’œuvre.
Greg Egan signe une nouvelle de prospective très angoissante sur le sujet des Intelligences Artificielles. La nouvelle ne sombre pas dans le pessimise de l’extrême et c’est sans doute pire. Car elle montre les capacités d’adaptation de cette famille face à ce qui leur arrive, la perte de leur emploi et leur incapacité à en retrouver un. Ils n’ont pas le choix et doivent faire avec, vivant au jour le jour. C’est une tranche de vie qui se veut très réaliste et ça la rend d’autant plus effrayante.
– Je vous appelle de la part des ressources humaines. Je dois vous demander de vider votre bureau. Assurez-vous de ne rien oublier, car une fois que vous aurez quitté l’étage, vous n’aurez plus l’occasion d’y revenir. »
Parution initiale en 2017. Traduit de l’anglais (Australie) par L’Epaule d’Orion. Titre original : The discreet charm of the Turing Machine.
Renaissance, Jean-Marc Ligny
La narrateur de cette histoire raconte sa vie sous un dôme entièrement régi par les Intelligences Artificielles, sur une Terre ravagée par le réchauffement climatique.
Jean-Marc Ligny revient dans le monde d’Exodes et d’AquaTM avec ce texte dont le placement après celui de Greg Egan est signifiante : après la monté en puissance des IA jusqu’à des atteindre des proportions délétères, vient le temps de la décroissance. Car en effet, ce que nous explique le narrateur, c’est comment les IA du dôme, après avoir rendus complètement dépendants les humains dont elles avaient la charge, les ont progressivement et discrètement rééduqués à se débrouiller seuls. Intéressant.
Bonsoir à toutes et tous. Vous avez demandé de raconter d’où je viens, comment je suis arrivé parmi vous. Je le fais bien volontiers car je vous dois au moins des explications en échange de votre accueil.
(incipit)
RêveVille, Thierry Di Rollo
A RêveVille, notre narrateur vit une vie parfaite dans un environnement parfaitement protégé, réglé comme du papier à musique. S’il est un bon citoyen, il pourra accéder à l’immortalité.
Dans cette nouvelle de quelques pages, Thierry Di Rollo esquisse un monde proprement terrifiant dans lequel les individus ont échangé leur identité et leur liberté contre l’immortalité.
Et c’est quelque temps plus tard, il y a deux ans béats de cela, au lendemain de la fête du Quatorze-Juillet célébrant notre fierté euphorique de Francs, que l’idée saugrenue m’a traversé l’esprit. Sans ombre, est-ce que mon corps est réel ?
Rayée, Audrey Pleynet
L’humanité est décimée par une maladie neurologique dégénérative qui n’offre aucun espoir de rémission. Le monde s’est écroulé, les humains ont massivement détruits les IA qui régissaient leur vie, les accusant de ne pas être capable de trouver un remède. Ceux qui restent continuent de tomber malades. Dans ce contexte, la narratrice tente d’inculquer l’art de la peinture à un robot.
Audrey Pleynet a un réel talent pour poser son lore je trouve. La somme d’informations qu’elle est capable d’insuffler dans une vingtaine de pages est impressionnante. J’ai particulièrement aimé le début du texte et sa façon d’introduire cette maladie avec le système de lettres tatouées, que l’on découvre progressivement. Le texte, à la première personne, est par ailleurs d’une tristesse infinie, désespéré.
« Lettres ? » hurla la voix.
Je brandis mon bras.
« C, M, S, R, I.
– Le T ? » inista la voix.
Poids dans la poitrine, gorge nouée.
« Barra, concédai-je. Le T est barré. Mais juste le T. »
Informations éditoriales
Revue publiée en janvier 2024 par les éditions Le Bélial’. Illustration de couverture par Thimothée Mathelin. 192 pages.
Pour aller plus loin
D’autres avis : Quoi de neuf sur ma pile, Au pays des cave trolls, Les lectures du maki, L’épaule d’Orion (Le charme discret de la machine de Turing), Constellations, ou signalez-vous en commentaire.
Y’a pas à dire, ça rend joyeux les IA. C’est marrant de voir que c’est Jean-Marc Ligny qui propose la nouvelle la moins sombre.
J’aimeJ’aime
Oui c’est vrai, ceci est un paradoxe j’espère que ça ne vas pas causer des dégâts irrémédiables à l’espace-temps littéraire.
J’aimeJ’aime
C’est amusant, j’ai adoré la couverture et me suis jeté dessus. Mais je n’ai pas encore lu les nouvelles. Merci de m’y faire penser à nouveau.
J’aimeJ’aime
Bonne lecture alors 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Il me dit bien ce numéro, il faudra que je pense à le commander à l’occasion. Je l’ai déjà notée, j’ai très envie de découvrir Audrey Pleynet !
J’aimeJ’aime
Ooh, bonne découverte de cette autrice alors. Elle a aussi été publiée en Une Heure Lumière aussi.
J’aimeAimé par 1 personne
Oui c’est le UHL que j’ai noté d’ailleurs 😊
J’aimeJ’aime
Parfait ^^
J’aimeJ’aime
Un numéro de qualité, visiblement! Je vais m’abstenir soigneusement de le lire, étant en passe de finir comme les personnages de la première nouvelle 😂😂
J’aimeJ’aime
😬😬😬
J’aimeAimé par 1 personne
Merci je viens d’apprendre un mot : « lore »
Les quatre nouvelles sont vraiment de qualité. Par contre il me semble que la nouvelle de Jean Marc Ligny s’inscrit plus dans l’univers de son recueil Les Ages Sombres ?! Nouvelle qui m’a donné envie de le lire d’ailleurs.
J’aimeJ’aime
C’est un terme issu du jeu vidéo ^^
Le recueil de nouvelles fait partie du même univers 😉
J’aimeJ’aime